Caracara ou l’oiseau garde-temps … Longue chronique en plusieurs temps !

Au tout début du mois de novembre 2024, je vous écrivais :

« Quant à l'élucubration qui en résultera ... la patience est de rigueur ! Après l'horloger, il s'agit de mettre en scène le ferronnier, le sculpteur et la céramiste ... ajuster le tout, y compris la corne de bovin pour le ... et les boutons de nacre pour les ...  Un lever de rideau prévu pour février 2025 » 

Prévisions assorties d’un chouia de décalage, mais qui importe bien peu face à la réalisation de notre céramiste Esther :

Avec talent, dextérité et motivation, elle a su donner à la huppe du caracara la structure idéale pour qu’elle s’intègre magnifiquement dans cette création plurielle.

Merci Madame et Bravissimo !     

Le Caracara ? nous en parlions déjà à mi-mai 2024 (décès d’Etienne Delessert) sans savoir vraiment comment cette rêverie se concrétiserait et puis au fil des jours et des chroniques, l’idée a mûri, l’image s’est précisée, les aléas du quotidien lui ont donné de la consistance.

Aussi, et pour en savoir plus si nécessaire, n’hésitez pas à jeter un œil sur les chroniques précédentes. Toutefois et sans retenue, plaçons ici ce précepte :

        « Ne pas s’intéresser à la culture de l’autre, c’est appauvrir la sienne ! »

En effet, grâce à l’aide précieuse des quatre artisane et artisan mentionnés ci-dessous, nous avons réussi à réaliser cette élucubration en associant le rose de Bourgogne, la céramique raku, la corne de bovin, les boutons de nacre, les anciennes enclumes du cordonnier et l’horloge comtoise de 200 ans d’âge dont le mécanisme s’inscrit dans une cage de fer aux dimensions de 27 cm en largeur, 27 cm en hauteur et 15 cm en profondeur. Le cadran est émaillé et son fronton en bronze coulé.

La pièce acquise date vraisemblablement des années 1810-1830 … car à partir de 1850, l’échappement à verge est remplacé par un échappement à ancre.

Que diantre, fichtre et mazette : 200 ans, cela fait un sacré bout de temps !

Certes, cette énumération -- malgré son âge -- ne peut pas être qualifiée d’historique ! Mais, à l’évidence, elle peut être considérée comme particulière. En effet, lors de la redécouverte du coffret d’Etienne Delessert (Post du 17.05.24), rien ne laissait présager que cette émotion printanière allait engendrer une telle rencontre de matériaux, qui se sont d’ailleurs rapidement plu au fur et à mesure des événements !

Elucubration no 108 (cliquer pour agrandir)

Alors c’est vraiment l’heure d’exprimer une « hénaurme » reconnaissance à :

Mesdames

Esther Schwizgebel, céramiste,

Svetlana Levieva du Bouton Chic,

Ainsi qu’à Messieurs

Antoine Lange, l’horloger,

Vincent Desmeules, le ferronnier,

Marc Pauchard, le sculpteur

Le fronton de l’horloge s’est arrondi en dos ailé, les anciennes enclumes du cordonnier utilisées pour pieds d’enfant ont repris vie en tant que perchoirs pour ce rapace argentin huppé, lequel accède enfin au rôle de garde-temps de la comtoise …

Il n’y a aura donc plus de tic-tac pour cette pendule de Morez, seulement Cara-cara, le fidèle compagnon du garde-temps ; celui qui par le regard rappelle que Si le temps est gratuit, il reste fort précieux. Amies et amis, ne le gaspillons pas ! 

N.B. Le cadran émaillé est signé Prost.  Il s’agit d’une famille, installée à la Rue des Forges à Morez depuis plusieurs générations. Un village attenant à celui de Morbier sur la route qui relie les Rousses à la ville historique de Saint-Laurent-en-Grandvaux. Depuis St.- Cergue, on y parvient par le col de la Givrine.

Merci à Michaël Villaz, l’horloger de Saint-Cierges.

 Le fronton a retrouvé sa « jeunesse dorée » après un bain dans l’ammoniaque dilué.

 Les aiguilles ont été placées dans une solution liquide de nettoyage traversée par des ondes ultrasonores.

Ne manquez pas « le dernier temps » de cette chronique : photos et propos « Hors antenne »

L’origine de cette élucubration remonte à l’été 2000, histoire contée dans la chronique de mai 2024. Par la suite, elle prit un caractère particulier par le fait qu’elle mettait en scène tout un lot d’objets, d’outils ou de matériaux, qui à priori n’avaient pas de points communs,

et réitérons - le : au départ, rien ne les destinait à cheminer ensemble ;

De même par la suite, à rester ensemble ! ... Alors que chacun trouvait sa place. 

Mais, sous le regard bienveillant de la déesse Athéna, la magie a opéré pour que poésie, imagination et absence d’interdits se retrouvent dans l’harmonie et en totale liberté d’actions ! 

« Créer, c’est aussi donner une forme à son destin »

« L'automne est un deuxième printemps où chaque feuille est une fleur »

Albert Camus, témoin de son temps aux multiples talents, est mort en 1960 dans un accident de voiture, âgé de 47 ans. Ci-dessus, deux de ses citations qui me parlent et que je vous laisse en guise de conclusion. Salut et tenez-vous joyeux !

Hors antenne :

Le vrai message de cette élucubration, c’est bien « le dilemme de la différence » aux fins de savoir si ce choix délicat mais fondamental représente une force ?

En optant plutôt pour une vision générale, sans pour autant invalider tout sentiment critique, nous devons bien constater que notre société souffre quotidiennement de la confrontation des cultures, des religions, des identités, des gestes et des avis.  Ce bouquet des différences génère des tensions, des conflits sans fin et des frictions, parce qu’il faut bien se l’avouer :  notre potentiel à la tolérance, notre qualité d’écoute et de partage font cruellement défaut.

Dès lors et au travers de cette rêverie, le défi ** fixé était de montrer que la différence est plutôt une entité qui offre vraiment la possibilité à un ensemble hétéroclite de se sublimer.                                        Alors à vous, maintenant, d’infirmer ou de confirmer ?

** Une occasion de sortir de sa zone de confort, d’aller vers quelque chose de nouveau.

Echapper à la routine et stimuler sa créativité :

que voilà deux bonnes raisons de poursuivre le chemin !

     " Oiseaux de Proie " ( Expo d'Etienne Delessert, sept. 2000, Avenches)

In fine : pour avoir lu avec beaucoup d’intérêt l’hommage de Jacques Poget, publié par Passé Simple no 102 d’avril 2025, c’est avec une modestie toute empreinte de retenue que je me félicite d’avoir eu cette émotion à l’été 2000 pour cet artiste de chez nous, père de Yok-Yok, le petit lutin.

Autre coïncidence non programmée :

L’exposition - hommage Etienne Delessert à l’Espace Arlaud, Lausanne,

du 28 mars au 29 juin 2025.

« La motivation est la force qui pousse à agir, tandis que l’engagement est celle qui propulse et amène à continuer d’agir »

Création :  Une activité qui n’est pas simple à décrire

Le Petit Robert nous dit : « Action de donner l'existence, de créer »

       Bon d’accord, mais un peu court…jeune homme ! n’est-il pas ?

En effet, l’artiste « puise » dans son imaginaire ou ses émotions pour l’exprimer et le partager avec autrui, se servant de son crayon, son pinceau, son burin, ses mains, sa paire de ciseaux. Dans ces divers prolongements, il le concrétise sur le papier, dans la pierre, le fer façonné, le verre fusionné ou l’argile cuite, mais aussi et de manière plus éphémère, dans le propos par l’expression orale !   (Assurément, une liste non exhaustive)

Durant mes courses à pied hebdomadaires, c’est une question récurrente !

Mais en aucun cas une inquiétude; plutôt une interrogation sur le chemin emprunté depuis une dizaine d’années 

Aussi, si au départ, c'est l’émotion ou la courte escale dans l’imaginaire qui est

 « la base référentielle et commune » à cette grande famille ? … ALORS ,

Quel regard !

Le "patson" suivant, et qui me correspond mieux, se concrétise par le regard bref ou prolongé sur un vieil outil, la pierre du chemin, un texte, une rencontre, le souvenir d’enfance ou celui occasionné tout simplement par un événement fortuit de la vie quotidienne et qui parfois prend racine profondément.

Pour certaines élucubrations, c’est l’histoire de quelques heures ou quelques jours pour y voir plus clair, mais pour d’autres,

Caracara par exemple, c’est … plus de 20 ans !

Esther Schwizgebel :   https://www.les-mains-dans-largile.ch/dernieres-expositions

Daniel de la Caudrie  :    l’auteur de la superbe photo de l’élucubration no 108